Cuisine Arabe : Un Voyage Exquis au Cœur des Saveurs Millénaires et des Traditions Partagées
1. Introduction : Plongée Envoûtante dans l'Univers de la Cuisine Arabe
L'évocation de la cuisine arabe transporte immédiatement l'esprit vers des images de marchés aux épices colorées, de tables débordantes de mets généreux et de parfums envoûtants où se mêlent la cannelle, le cumin et la coriandre. Plus qu'une simple tradition culinaire, c'est un univers où l'hospitalité et le partage sont érigés en art de vivre. Chaque plat raconte une histoire, chaque saveur est une invitation à la convivialité.
La cuisine arabe, loin d'être une entité monolithique, se déploie en une fascinante mosaïque de traditions régionales. Elle englobe les trésors gastronomiques du Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie), les délices du Levant (Liban, Syrie, Jordanie, Palestine), les saveurs distinctes de la péninsule arabique, la richesse culinaire de l'Égypte et les traditions ancestrales de l'Irak. Malgré cette diversité, des dénominateurs communs tissent un fil conducteur : le pain, souvent pétri à la maison et prenant des formes variées, occupe une place centrale, tout comme les soupes réconfortantes telle la chorba.
L'utilisation généreuse d'une palette d'épices sophistiquées et la prédilection pour des ingrédients comme les légumineuses, l'agneau et les herbes fraîches caractérisent également cet ensemble culinaire. La langue arabe et l'influence de l'Islam, notamment à travers les prescriptions alimentaires halal, constituent des facteurs culturels unificateurs, bien que de nombreuses communautés, y compris chrétiennes et autres, aient contribué à l'enrichissement de ce patrimoine gastronomique au fil des siècles.
L'engouement mondial pour la cuisine arabe n'est pas un hasard. Elle est perçue comme une cuisine saine, savoureuse et profondément conviviale, ce qui explique son attrait croissant sur la scène internationale. Elle a cette capacité unique de transcender les barrières culturelles, devenant un puissant vecteur de compréhension et d'appréciation mutuelle entre les peuples. La diaspora arabe, en emportant avec elle ses traditions et ses recettes, a joué un rôle déterminant dans cette diffusion planétaire.
Au-delà de la simple satisfaction des papilles, la cuisine est un "véritable vecteur d'identité et de cohésion" et permet de "se connecter avec son héritage". La nourriture n'est pas seulement une subsistance, mais un langage porteur de sens. Les recettes, transmises précieusement de génération en génération, incarnent l'histoire familiale et collective, le vécu d'une communauté. Les spécificités régionales, si marquées au sein même du monde arabe – un habitant d'Afrique du Nord pouvant se sentir avant tout Maghrébin avant de s'identifier comme Arabe par exemple – illustrent comment l'art culinaire façonne et définit des identités multiples. Ainsi, s'aventurer dans la cuisine arabe, c'est entreprendre un voyage à la découverte de l'âme et de l'histoire des peuples qui la composent, une clé de lecture culturelle essentielle pour appréhender la richesse de cet univers.
2. Aux Origines des Saveurs : Histoire et Influences Croisées de la Gastronomie Arabe
La gastronomie arabe est le fruit d'une longue et riche histoire, un héritage ancestral façonné par les modes de vie nomades des Bédouins et la grandeur des empires qui se sont succédé. Les premières traditions culinaires étaient celles des Bédouins, une cuisine adaptée à la vie nomade du désert, reposant sur des aliments de base tels que les dattes, les fruits secs, les noix, le blé, l'orge, le riz, ainsi que les viandes d'élevage comme les vaches, les moutons et les agneaux, sans oublier les produits laitiers. Cette cuisine, simple mais nourrissante, a évolué avec la sédentarisation progressive, intégrant des techniques comme la fermentation pour la conservation des aliments et la cuisson du pain dans des fours rudimentaires.
Les grandes civilisations de l'Antiquité, notamment les Perses, les Égyptiens et plus tard les Ottomans, ont profondément marqué les traditions culinaires de la région. Le tajine marocain, par exemple, trouverait ses origines au IXe siècle, sous le califat d'Harun al Rashid, témoignant de l'ancienneté de certaines préparations emblématiques.
La situation géographique du monde arabe, au carrefour des civilisations, en a fait un lieu d'échanges intenses, ce qui se reflète magnifiquement dans sa cuisine. Pendant des siècles, les routes commerciales ont été les vecteurs de diffusion d'ingrédients, d'épices et d'herbes aromatiques. C'est ainsi que le café, originaire d'Éthiopie, a été introduit au Yémen, et que le riz a voyagé depuis l'Inde pour devenir un aliment de base dans de nombreuses régions. Des épices fondamentales aujourd'hui, comme le cumin, la coriandre et le curcuma, ont été apportées par les marchands venus d'Inde et d'Asie du Sud-Est.
Les influences culturelles se sont entremêlées pour créer une palette de saveurs unique :
- L'influence Berbère, particulièrement prégnante au Maghreb, a légué des plats aussi fondamentaux que le couscous et le tajine. Les Berbères, peuples autochtones d'Afrique du Nord, ont également introduit l'usage d'ingrédients locaux comme les olives, les figues, les dattes et les fameux citrons confits.
- Les conquêtes arabes du VIIe siècle ont apporté avec elles de nouvelles épices telles que le safran, la cannelle et le cumin, ainsi que des techniques culinaires plus sophistiquées qui se sont harmonieusement mélangées aux pratiques berbères existantes.
- L'héritage Andalou, transmis par les Maures après leur départ de la péninsule ibérique, a enrichi la cuisine, notamment marocaine, avec les subtiles combinaisons sucré-salé (comme l'agneau aux pruneaux ou le poulet aux abricots), et l'introduction des amandes, des oranges et du sucre. La pastilla, ce chef-d'œuvre de la gastronomie festive, est un vibrant témoignage de cet apport andalou.
- L'Empire Ottoman, dont l'influence s'est étendue jusqu'en Afrique du Nord à partir du XVIe siècle, a également laissé son empreinte, notamment dans les méthodes de grillade des viandes et dans certains types de pâtisseries.
- Plus récemment, les influences européennes, issues de la période coloniale, se sont aussi fait sentir. Au Maroc, par exemple, l'influence française est perceptible dans un certain usage du beurre et dans l'importance accordée aux pâtisseries et desserts, tandis que l'influence espagnole se manifeste dans l'utilisation des olives et de l'huile d'olive.
- Les influences indiennes sont également notables, en particulier avec le biryani. Bien que l'origine exacte de ce plat de riz épicé soit sujette à débat, il témoigne d'une connexion avec le sous-continent indien, notamment via les Moghols. Le biryani est aujourd'hui un plat populaire dans les pays du Golfe et en Irak. De manière réciproque, la cuisine des Moplahs, une communauté musulmane du Kerala en Inde, porte les marques d'influences arabes, perses et mogholes.
Cette histoire complexe d'échanges, de conquêtes et d'adaptations fait de la cuisine arabe un véritable "creuset culinaire". Chaque strate d'influence – bédouine, perse, ottomane, andalouse, berbère – ne s'est pas substituée à la précédente mais s'y est superposée, fusionnée, créant une richesse et une complexité uniques. Les routes commerciales ont constamment alimenté ce dynamisme en introduisant de nouveaux ingrédients et de nouvelles techniques. Même les influences plus récentes, comme celles venues d'Europe, ont été assimilées et réinterprétées. Il en résulte une tradition culinaire vivante, un témoignage éloquent de l'histoire des interactions culturelles, qui continue d'évoluer aujourd'hui sous l'effet de la mondialisation et des tendances de la cuisine fusion.
3. Tour du Monde des Saveurs Arabes : Un Festin Régional
La cuisine arabe, dans sa vaste étendue géographique, se décline en une multitude de saveurs régionales, chacune avec son caractère, ses plats emblématiques et ses ingrédients fétiches. Ce voyage culinaire nous mènera du Maghreb au Levant, en passant par les pays du Golfe, l'Égypte et l'Irak.
A. Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie) : Le royaume des tajines, couscous et pâtisseries parfumées
La cuisine du Maghreb est célèbre pour ses mélanges audacieux de saveurs sucrées et salées, l'utilisation subtile et complexe d'épices telles que la cannelle, la coriandre, le curcuma, le cumin, le gingembre, le précieux safran et la piquante harissa. Les citrons confits, avec leur saveur unique, sont un ingrédient signature de nombreux plats, et l'huile d'olive y est omniprésente, constituant la base de nombreuses préparations.
Plats Emblématiques :
- Le Tajine : Ce ragoût mijoté tire son nom du plat conique en terre cuite dans lequel il cuit lentement, permettant aux saveurs de se concentrer et aux ingrédients de devenir incroyablement tendres. Les variations sont infinies, allant du célèbre tajine de poulet aux olives et citrons confits à celui d'agneau aux pruneaux et amandes, en passant par des créations plus originales comme le tajine de poulet aux fruits caramélisés.
- Le Couscous : Véritable symbole de la cuisine maghrébine, ces fins granulés de semoule de blé dur, cuits à la vapeur, sont servis avec un généreux bouillon de légumes épicés et de la viande (mouton, poulet). C'est un plat de partage par excellence, traditionnellement dégusté le vendredi, et reconnu au patrimoine immatériel de l'UNESCO.
- La Pastilla (ou Bisteeya) : Cette tourte somptueuse, souvent servie lors des grandes occasions, est un héritage andalou. Elle marie des feuilles de brick croustillantes à une farce sucrée-salée, traditionnellement à base de pigeon ou de poulet, agrémentée d'amandes, de sucre glace et de cannelle.
- La Harira (Maroc) ou Chorba (Algérie, Tunisie) : Ces soupes riches et nourrissantes, à base de légumineuses (lentilles, pois chiches), de tomates, de viande (agneau ou bœuf), de vermicelles et d'un bouquet d'épices, sont particulièrement appréciées pendant le mois de Ramadan pour rompre le jeûne.
- Les Briks (Tunisie) ou Boureks (Algérie) : Ce sont des chaussons croustillants en feuille de brick, farcis de diverses préparations (viande hachée, thon, œuf, légumes).
- Le Méchoui : Un plat de fête spectaculaire où un agneau entier est rôti lentement à la broche ou dans un four traditionnel, jusqu'à ce que la viande soit tendre et savoureuse.
- Salades et Accompagnements : La salade de carottes au cumin est un classique, tout comme le Zaalouk marocain (un caviar d'aubergines fondant et parfumé) ou la Chakchouka algérienne (une compotée de poivrons et de tomates).
- Pâtisseries : Les douceurs maghrébines sont renommées, avec des incontournables comme les cornes de gazelle aux amandes, les makrouts fourrés aux dattes, et les baklavas au miel et aux fruits secs.
- Boissons : Le thé à la menthe, servi selon un rituel précis, est la boisson de l'hospitalité par excellence.
Le Maroc se distingue par la minutie de ses préparations et l'art de marier les saveurs sucrées et salées avec une grande subtilité dans l'usage des épices. Des plats comme la Tangia, un ragoût de viande mijoté pendant des heures dans une jarre en terre cuite typique de Marrakech, illustrent cette spécificité. La Tunisie est réputée pour ses keftas (boulettes de viande épicées), tandis que l'Algérie offre des spécialités comme la Choukhchoukha, un plat convivial à base de fines crêpes émiettées et d'une sauce riche.
B. Levant (Liban, Syrie, Jordanie, Palestine) : L'art du mezze, des grillades et des herbes fraîches
La cuisine levantine est une célébration de la fraîcheur et de la convivialité, caractérisée par une extraordinaire variété de mezzes – petites entrées colorées et savoureuses destinées à être partagées. L'huile d'olive de première qualité, le jus de citron acidulé, l'ail parfumé, et une abondance d'herbes fraîches comme le persil, la menthe et la coriandre sont les piliers de cette cuisine. Le tahini (crème de sésame), le sumac (une épice acidulée) et le zaatar (un mélange d'herbes et de sésame) apportent des saveurs distinctives. Des fromages comme le halloumi, parfait pour être grillé, et le shanklish, un fromage épicé, sont également typiques.
Plats Emblématiques :
- Le Mezze : C'est une véritable institution, comprenant une multitude de petits plats tels que le Hummus (purée de pois chiches au tahini), le Baba Ghanoush ou Moutabal (caviar d'aubergine fumée au tahini), le Taboulé (une salade vibrante où le persil et la menthe dominent, avec boulgour et tomate), les Falafels (boulettes croustillantes de pois chiches ou de fèves frites), le Kibbeh (boulettes de boulgour farcies à la viande hachée épicée), les Warak Enab (feuilles de vigne farcies de riz et parfois de viande), et le Fattoush (une salade croquante avec des morceaux de pain pita grillé et saupoudrée de sumac).
- Plats Principaux : Le Shawarma, cette viande marinée (agneau, poulet ou bœuf) rôtie lentement à la broche verticale et servie en sandwich, est une star de la street-food. Les Kaftas, brochettes de viande hachée et épicée, sont également très populaires. Le Mansaf est le plat national de la Jordanie, un mets festif composé d'agneau cuit dans une sauce au yaourt de brebis fermenté et séché (jameed), servi sur un lit de riz et parsemé de pignons de pin et d'amandes.
- Boissons : L'Arak, un alcool anisé puissant, est souvent dégusté en accompagnement des mezzes.
Des variations régionales enrichissent ce panorama. En Syrie et au Liban, la Mujadara, un plat réconfortant de riz aux lentilles garni d'oignons frits, connaît différentes interprétations. La cuisine syrienne propose des délices comme le Fassoulieh b'zeyt (haricots verts mijotés à l'huile d'olive et à la tomate), le Bazalieh (ragoût de petits pois à la viande) ou encore les Chich Barak (de délicats raviolis farcis à la viande et cuits dans une sauce au yaourt). La Palestine est fière de son Musakhan, un plat savoureux de poulet rôti au sumac et aux oignons caramélisés, servi sur du pain taboon.
C. Pays du Golfe (Arabie Saoudite, Émirats Arabes Unis, Koweït, Qatar, Bahreïn, Oman) : La splendeur des riz épicés et des traditions bédouines
La cuisine des pays du Golfe Persique est marquée par l'omniprésence du riz, souvent très parfumé grâce à un usage généreux d'épices comme la cardamome, la cannelle, les clous de girofle, le safran et le loomi (citrons noirs séchés qui confèrent une saveur acidulée et terreuse unique). Les viandes privilégiées sont le mouton et le poulet, mais la viande de chameau est également consommée, héritage des traditions bédouines. Les dattes, fruits emblématiques de la région, sont consommées en abondance, fraîches, séchées, ou intégrées dans diverses préparations. Contrairement au Levant ou au Maghreb, les produits laitiers frais sont traditionnellement moins courants dans les centres urbains.
Plats Emblématiques :
- Le Kabsa (Arabie Saoudite) ou Machboos (autres pays du Golfe) : C'est le plat de riz par excellence, extrêmement parfumé, où le riz est cuit avec de la viande (poulet, agneau, voire chameau), des légumes, un mélange complexe d'épices, et parfois agrémenté de fruits secs comme des raisins ou des abricots, ainsi que de noix. Il est souvent considéré comme le plat national en Arabie Saoudite.
- Le Harees ou Jareesh : Un plat ancien et réconfortant, préparé en faisant cuire longuement du blé concassé avec de la viande (poulet ou agneau) jusqu'à obtenir une consistance crémeuse, semblable à un porridge.
- Le Madrouba : Ce plat, dont le nom signifie "battu" en arabe, a une texture de purée lisse. Il est généralement préparé avec du poulet, du poisson ou de l'agneau, mélangé avec du riz, des tomates, des oignons, du yaourt, du beurre et des épices locales.
- Le Tharid : Un ragoût de viande et de légumes, traditionnellement servi sur des morceaux de pain plat émiettés qui s'imprègnent du bouillon savoureux.
- L'Ouzi ou Shuwaa : Un plat festif de riz parfumé avec des légumes et de la viande, parfois enveloppé dans une fine pâte filo ou, de manière plus traditionnelle, cuit lentement dans un four creusé dans le sol.
- Les Luqaimat : De délicieux beignets ronds et dorés, frits puis trempés dans du miel ou du sirop de dattes, une douceur populaire lors des rassemblements.
- Le Camel Burger : Une adaptation plus moderne que l'on peut trouver notamment à Dubaï, témoignant de l'évolution des goûts.
- Boissons : Le thé et le café, souvent parfumés à la cardamome, sont omniprésents. D'autres boissons traditionnelles incluent le Karakaden (infusion d'hibiscus) et le Naqe'e Al Zabib (une boisson rafraîchissante à base de raisins secs).
D. Égypte : Un héritage pharaonique dans l'assiette
La cuisine égyptienne porte en elle les échos d'un héritage millénaire, où le pain (Aish Baladi ou pain pita, Lavash) occupe une place centrale, sa fabrication remontant à l'époque des pharaons. Elle se caractérise par une utilisation généreuse de l'ail, de l'oignon, du cumin, des citrons séchés et des piments.
Plats Emblématiques :
- Le Foul Medames : Plat national par excellence, ces fèves mijotées lentement sont un incontournable du petit-déjeuner égyptien, généralement assaisonnées d'ail, d'huile d'olive, de jus de citron et de cumin.
- La Ta'ameya (Falafel égyptien) : Contrairement à leurs cousins levantins à base de pois chiches, les falafels égyptiens sont confectionnés à partir de fèves, ce qui leur donne une saveur et une texture distinctes. Ils sont souvent servis en sandwichs ou dans le cadre d'un mezze.
- Le Koshari : Un plat de rue emblématique et incroyablement populaire, le Koshari est un mélange nourrissant et économique de riz, de lentilles brunes, de macaronis et de pois chiches, le tout nappé d'une sauce tomate épicée à l'ail et au vinaigre, et garni d'oignons frits croustillants.
- La Molokhia : Une soupe verte, épaisse et visqueuse, préparée à partir des feuilles de corète potagère (une plante également appelée molokhia). Elle est traditionnellement cuisinée avec de l'ail et de la coriandre, et souvent servie avec du poulet, du lapin ou du riz.
- Le Mahshi : Ce terme désigne une variété de légumes farcis, tels que les courgettes, les poivrons, les aubergines ou les feuilles de vigne, avec un mélange de riz, d'herbes (aneth, persil, coriandre) et parfois de viande hachée, le tout mijoté dans un bouillon de tomate.
- La Fatta : Un plat festif, souvent préparé pour les grandes occasions, composé de couches de pain plat croustillant (aish baladi) et de riz, recouvertes d'un bouillon de viande parfumé à l'ail et au vinaigre, et garni de morceaux de viande (généralement de l'agneau ou du bœuf).
- Pâtisseries : L'Égypte partage avec le reste du Moyen-Orient un amour pour les douceurs sucrées comme les baklavas, la konafa (des vermicelles de pâte fourrés de crème ou de fromage et imbibés de sirop), la basbousa (un gâteau de semoule au sirop) et la halawa (une confiserie dense à base de pâte de sésame et de sucre).
- Boissons : Le thé à la menthe est populaire, tout comme l'infusion d'hibiscus (appelée Karkadé), très rafraîchissante, et le café turc, fort et aromatique.
E. Irak : Saveurs de Mésopotamie, entre tradition et générosité
La cuisine irakienne, héritière des traditions de l'ancienne Mésopotamie, est une cuisine riche et généreuse, marquée par les influences des empires perse et ottoman. Elle se distingue par l'utilisation d'épices telles que la cardamome, la cannelle, les clous de girofle et la noix de muscade. Le pain Samoon, reconnaissable à sa forme de losange et souvent cuit dans un four tandoor, est un aliment de base qui accompagne la plupart des repas.
Plats Emblématiques :
- Le Masgouf : Considéré par beaucoup comme le plat national de l'Irak, le Masgouf est une préparation spectaculaire de poisson d'eau douce (généralement de la carpe) qui est mariné, puis embroché et cuit lentement à la verticale autour d'un feu ouvert, ce qui lui confère une saveur fumée unique.
- La Dolma : Comme dans d'autres régions du Moyen-Orient, la Dolma irakienne consiste en une variété de légumes (poivrons, tomates, oignons, aubergines, feuilles de vigne) farcis d'un mélange savoureux de riz, de viande hachée (souvent de l'agneau), d'herbes aromatiques et d'épices.
- Le Quzi (ou Ghoozi) : Un plat de fête somptueux, le Quzi est un agneau entier (ou de gros morceaux d'agneau) cuit très lentement jusqu'à ce qu'il soit fondant, traditionnellement servi sur un grand lit de riz parfumé, garni de noix grillées et de raisins secs. C'est un symbole de générosité et d'hospitalité.
- Le Biryani Irakien : Semblable à d'autres biryanis de la région, la version irakienne est un plat de riz richement parfumé avec de la viande (poulet ou agneau), un mélange distinct d'épices (cardamome, cannelle, clous de girofle, noix de muscade, curcuma), et parfois des vermicelles frits, des pommes de terre et des petits pois. Il témoigne souvent d'une influence indienne.
- La Kubba (ou Kibbeh) : Ce sont des boulettes ou des croquettes dont l'enveloppe peut être faite de riz (comme la Kubba Halab, colorée au curcuma et farcie de viande), de boulgour, ou de pomme de terre, farcies de viande hachée épicée. Elles peuvent être frites, bouillies dans un bouillon, ou même cuites au four.
- Le Tepsi Baytinijan : Une sorte de gratin ou de casserole d'aubergines, préparé avec des couches d'aubergines frites, de viande hachée, de tomates, de poivrons et d'oignons, le tout mijoté dans une sauce tomate.
- Le Harees (ou Jareesh / Harissa) : Similaire au plat du même nom dans les pays du Golfe, c'est un porridge épais de blé concassé et de viande, cuit longuement.
- La Makhlama : Une poêlée consistante d'agneau haché et d'œufs, souvent épicée et servie au petit-déjeuner ou comme plat léger.
- Le Turshi Shalgham : Des pickles (légumes marinés) populaires, principalement à base de navets, mais incluant souvent du chou-fleur et des betteraves, qui leur donnent une couleur rose vif. Ils accompagnent de nombreux plats.
La péninsule arabique, notamment le Yémen, possède également des traditions culinaires distinctes. Le Saltah, considéré comme le plat national yéménite, est un ragoût de viande (appelé maraq) sur lequel on ajoute une mousse de fenugrec (holba) et du sahawiq, une sauce pimentée à base de tomates, d'ail et d'herbes. D'autres spécialités yéménites incluent l'Aseed (une bouillie épaisse), la Fahsa (un ragoût de viande mijoté), le Mandi (viande et riz cuits dans un tandoor) et le Bint al-Sahn (un gâteau feuilleté au miel).
Cette exploration régionale met en lumière un phénomène fascinant : de nombreux plats, tels que le couscous, le tajine, le hummus, le falafel, le biryani, le kebbeh/kubba ou le harees, se retrouvent dans plusieurs régions du monde arabe. Cependant, ils présentent presque toujours des variations significatives en termes d'ingrédients spécifiques, de mélanges d'épices utilisés, ou de méthodes de préparation. Par exemple, le falafel est confectionné à base de pois chiches au Levant, tandis qu'en Égypte, ce sont les fèves qui sont privilégiées pour la ta'ameya. De même, le biryani connaît des interprétations distinctes en Irak et dans les pays du Golfe, chacune avec sa propre signature aromatique.
Cette diffusion de plats et de techniques de base à travers le monde arabe s'explique par les intenses échanges commerciaux historiques et l'influence des grands empires, comme l'empire ottoman ou les califats arabes. Néanmoins, les conditions climatiques locales, la disponibilité des produits agricoles, et les traditions culturelles propres à chaque sous-région ou pays ont inévitablement conduit à des adaptations uniques et à la création de saveurs locales distinctes. L'identité culinaire de chaque nation ou région se forge ainsi à la fois à travers ces éléments partagés, qui créent un sentiment d'appartenance à un ensemble culturel plus vaste, et par ces différenciations fièrement revendiquées, qui témoignent d'une créativité et d'une histoire locales. C'est cette dualité qui fait toute la richesse et la complexité de la "cuisine arabe", un concept unificateur qui embrasse en réalité une extraordinaire multitude de traditions et de saveurs spécifiques.
Le tableau suivant offre une vue d'ensemble comparative, permettant de saisir rapidement les grandes lignes de chaque tradition culinaire régionale et de comprendre à la fois leurs points communs et leurs différences.
Tableau 1 : Panorama des Spécificités Culinaires Arabes par Région
Région | Plats Emblématiques | Ingrédients/Épices Clés | Techniques/Caractéristiques Notables |
---|---|---|---|
Maghreb | "Tajine, Couscous, Pastilla, Harira/Chorba" | "Citrons confits, safran, gingembre, cannelle, ras el hanout, harissa, huile d'olive" | "Mijotage lent (tajine), cuisson vapeur (couscous), saveurs sucré-salé" |
Levant | "Mezze (Hummus, Taboulé, Falafel), Shawarma, Mansaf, Kibbeh" | "Huile d'olive, citron, ail, persil, menthe, tahini, sumac, zaatar" | "Art du mezze, grillades, abondance d'herbes fraîches" |
Golfe | "Kabsa/Machboos, Harees/Jareesh, Madrouba, Ouzi" | "Cardamome, cannelle, clous de girofle, safran, loomi (citrons noirs séchés), dattes, riz" | "Riz très parfumé, traditions bédouines, cuisson lente des viandes" |
Égypte | "Foul Medames, Ta'ameya, Koshari, Molokhia" | "Ail, oignon, cumin, fèves, citrons séchés, coriandre" | "Plats à base de fèves, cuisine de rue populaire, héritage ancien" |
Irak | "Masgouf, Dolma, Quzi, Kubba" | "Cardamome, cannelle, noix de muscade, baharat (mélange d'épices), pain Samoon" | "Grillades de poisson (Masgouf), plats de fête généreux, influences perses/ottomanes" |